ET SI L’EXPERIENCE ETAIT FORMATRICE ?

«un incapable scolairement garanti et un compétent scolairement démuni sont séparés à vie, tels le roturier et le noble»

P. Bourdieu (Propositions pour l’enseignement de l’avenir, rapport au Collège de France, 1985)

C’est pour atténuer cette injustice initiale liée au poids démesuré de la sélection par le diplôme initial sur la suite de la carrière professionnelle des salariés que vont se développer deux types de validation : la Validation des Acquis Professionnels (à partir de 1985) et la Validation des Acquis de l’Expérience (à partir de 2002).

VAP/ VAE : une même reconnaissance de l’expérience pour des objectifs différents

La Validation des Acquis Professionnels, c’est quoi ?

La VAP est un dispositif qui permet à une personne de justifier de l’acquisition des prérequis nécessaires à une entrée en formation, par la mise en évidence de ses expériences professionnelles passées.

Parmi les exemples de cas pouvant être intéressés par la démarche, on peut citer un technicien de maintenance disposant d’une quinzaine d’années d’expérience professionnelle avec un bac ou un niveau bac et souhaitant évoluer vers des fonctions d’encadrement. Il est assez fréquent que pour accéder à ces postes de management un niveau Master soit requis. A travers la VAP, cette personne peut faire valoir ses compétences, auprès du responsable de la formation du Master choisi, pour valider son inscription à un diplôme de Niveau I, sans disposer du Niveau II ordinairement requis.

La VAP se présente comme un CV détaillé qui permettra au candidat à la formation de mettre en évidence tel ou tel moment de sa carrière pour illustrer l’acquisition des prérequis. Il est donc important de préciser que la VAP n’est pas diplômante, elle valide l’accès à une formation diplômante.

Il faudra attendre 2002 pour que la loi sur la Validation des Acquis de l’Expérience entre en vigueur sous l’impulsion de Vincent Merle alors Directeur du cabinet de la secrétaire d’État à la formation professionnelle Nicole Péry.

La Validation des Acquis de l’Expérience, c’est quoi ?

Toujours dans une optique de reconnaissance de l’expérience professionnelle ou extra-professionnelle et dans une volonté de « rattrapage » par le diplôme, la VAE permet à un salarié de valider un diplôme, indépendamment de son niveau de formation initial, s’il peut justifier, par son expérience, de l’acquisition des compétences inscrites au référentiel de compétences du diplôme.

En 2002, en parallèle de la loi sur la VAE, est créé le Répertoire National des Certifications Professionnelles qui liste l’ensemble des diplômes accessibles à la VAE.

Puisque la VAE permet l’obtention d’un diplôme, le processus est beaucoup plus long et exigeant que la VAP.

On peut diviser ce processus en 4 étapes :

  1. Identification du diplôme envisagé par la mise en relation du référentiel de diplôme, via le RNCP, avec les expériences professionnelles ou extra-professionnelles du candidat.
  2. Prise de contact avec l’organisme certificateur (école, université…) pour étude de la recevabilité de la demande de VAE par celui-ci.
  3. Si le candidat est jugé recevable par l’organisme certificateur, il doit ensuite rédiger un livret II. Il s’agit d’un mémoire dans lequel il décrit de façon détaillée des réalisations professionnelles ou extra-professionnelles à partir desquelles un jury étudiera l’adéquation entre les acquis développés par le candidat et le référentiel de compétences du diplôme. Lors de cette phase de rédaction du livret II, le candidat peut se faire accompagner par un conseiller VAE. L’objet de cet accompagnement est double, il doit permettre, à la fois, au candidat de comprendre les attentes du jury mais également de parvenir à un certain niveau de réflexivité sur son Travail.
  4. Présentation du mémoire au jury (composé de professionnels du domaine et de membres de l’organisme certificateur) qui pourra refuser la validation, valider en totalité le diplôme ou le valider partiellement. Dans le cas d’une validation partielle, le candidat disposera d’un délai de 5 ans pour obtenir les Unités d’Enseignement manquantes dans le cadre de la formation continue.

La durée de réalisation d’un VAE dépendra de la date de constitution du jury et du degré d’implication du candidat, elle varie entre 4 mois et un an.

Ces deux dispositifs VAP et VAE ont en commun de reconnaître les apports de l’expérience du candidat pour lui permettre, dans un terme plus ou moins long, de valider un diplôme. Avant de s’engager dans une telle démarche, il est important de s’interroger sur le(s) bénéfice(s) attendu(s). Pour une personne qui, après 10 ou 20 ans d’expérience professionnelle, souhaiterait valider un diplôme en lien avec cette expérience, les bénéfices peuvent être de deux ordres : une évolution de carrière en interne ou en externe et/ou un sentiment de revanche sur un passé scolaire souvent vécu comme un échec ou une frustration.

Le bilan de compétences permet de s’interroger sur la balance coût/bénéfice de ces validations de diplôme avant de s’y engager. Le bilan de compétences permet également d’imaginer, avec les candidats, d’autres pistes en matière de formation en s’éloignant de la norme du diplôme. Des organismes de formation comme le CNAM, par exemple, permettent à des salariés de suivre des Unités d’Enseignement « à la carte » en s’adaptant à leurs rythmes professionnels ou familiaux.

VAP, VAE, formation diplômante ou non, autant de dispositifs offrant aux salariés la joie, le plaisir, la curiosité de se retrouver en situation d’apprenant.

Vincent MARITANO
Consultant en Bilan de compétences
MAM RH